Manager demain : un recadrage nécessaire

Octave A la Une, Futur du Travail

Manager demain : un recadrage nécessaire


Manager de demain : un recadrage nécessaire

En préambule, le manager recouvre des réalités différentes selon la fonction

Aurait-on idée, dans le domaine sportif, de désigner par le même mot le dirigeant du club,  l’entraîneur et le capitaine de l’équipe ? Il en va de même dans l’entreprise. Traditionnellement, il revient :

  • Au dirigeant le soin de définir la mission de l’entreprise, arrêter la stratégie, définir les priorités et souvent traduire la stratégie en objectifs opérationnels.
  • Au manager intermédiaire (souvent dénommé chef de service) de définir les plans d’action correspondant, d’en assurer le pilotage et en contrôler l’exécution.
  • Au manager de proximité d’assurer la production, au quotidien, des biens ou services dont il a la responsabilité dans le respect des standards ayant cours.

Nous nous intéresserons ici au manager intermédiaire, lui-même manager des managers de proximité.

L’indispensable mutation de la fonction managériale

Nouvelles manières de créer de la valeur, nouveaux métiers, nouveaux modes de travail, nouvelles générations aux aspirations et priorités bien affirmées, tout bouge en permanence et de plus en plus vite.

  • Côté entreprise, dans un monde VUCA[1], incertitude, ambiguïté et complexité sont devenus la norme. En rester à l’entreprise taylorienne massifiant le travail et rendant les salariés interchangeables, et à ses modes de fonctionnement hiérarchique, autoritaire et axé sur le contrôle, c’est signer sa disparition à terme.  L’avenir est à l’entreprise agile, capable de s’adapter en temps réel aux évolutions de l’environnement, voire même à les devancer. Ce qui, en toute logique, impliquerait d’abandonner le mode de travail traditionnel : planification, exécution, contrôle, ajustement. Et de facto de renoncer à valoriser la discipline et la fiabilité pour leur préférer l’autonomie et la réactivité.
  • Côté collaborateurs, l’évolution sociétale s’accompagne d’une modification des attentes, faisant des collaborateurs des insoumis:
    • Les nouvelles générations s’attendent à pouvoir agir au sein de l’entreprise comme ils le font hors de l’entreprise, NTIC et réseaux sociaux aidant. Communiquer librement, exprimer leur point de vue, coopérer, collaborer leur est naturel.
    • La volonté de réussir sa vie l’emporte sur celle de réussir dans la vie : leur adhésion devient incontournable et leur fidélité ne se mesure qu’à l’aulne de ce que leur apporte l’entreprise.
  • Pour faire bonne mesure, à l’heure de la robotisation, de l’IA, restent à l’homme, dans le travail :
    • Côté « savoir-faire » métier, l’adaptation rapide aux aléas,
    • Côté humain, toutes les subtilités de la relation à l’autre (client, usager, patient, co-équipier,…).

Ce travail mobilise tellement notre intellect et notre émotivité qu’il en devient indissociable de notre personnalité, pudiquement identifiée sous le terme de « compétences comportementales ». La personne prend le pas sur la fonction. Comment, dès lors ne pas être dans l’obligation, quoi qu’il en coûte, de porter attention à chacun ?

Le management « classique » est devenu contre-productif

Plus le choix ! Le manager nouveau est « condamné » à voir en la singularité de chacun de ses collaborateurs un ingrédient majeur de la réussite collective, et donc, de sa réussite personnelle.

La question n’est plus, ce que vos collaborateurs peuvent faire pour vous, mais ce que vous pouvez faire pour eux. On ne peut pas pousser sur une ficelle ! Il revient au manager de donner envie à ses collaborateurs d’exprimer leur potentiel, développer leur pouvoir d’agir, le tout au service d’un projet qui les dépasse et donne du sens à leur investissement.

Aujourd’hui, le théorème de Martin Richer devient postulat : « Tu veux que je m’engage, j’enrage ; tu m’imposes, je m’oppose ; tu m’impliques, je m’applique. »

Manager, à vous de jouer !

Il serait vain de vouloir se conformer au tableau idyllique, liste à la Prévert, des qualités du « parfait petit manager », véritable mouton à cinq pattes (au minimum !).

Bien sûr le manager pourra se nourrir de formations, et même de recettes s’il « les sent bien ».

Mais l’essentiel est ailleurs : il est en vous, en « Qui vous êtes » beaucoup plus qu’en « qui vous croyez qu’il faut être » ou « qui vous pensez qu’il faut donner à voir ».

Pour une première raison : les actes parlent infiniment plus que les paroles et si actes et paroles ne sont pas en adéquation, c’est la confiance en vous qui sera mise à mal. Or, sans confiance, il est impossible de construire quoi que ce soit.

Et pour une seconde raison : le management ne se réduit pas à l’application de techniques ou de recettes, c’est un art. Et l’art se caractérise par l’apport d’un supplément d’âme avec lequel aucune technique, aussi brillamment exécutée soit-elle, ne pourra rivaliser.

A vous, managers, d’apporter, avant tout, ce supplément d’âme et c’est de votre âme dont il est question !

[1] VUCA : acronyme pour « volatilité, incertitude, complexité et ambiguïté »

De formation à la fois scientifique et littéraire, psychologue et première femme diplômée de l’ISSEC (devenu ESSEC Management Spécialisé), Monique Pierson a occupé des postes de responsable RH, directrice d’hypermarché, directrice des achats et de la logistique, membre d’un Comité de Direction dans la grande distribution, avant de créer son propre cabinet de conseil en management. Elle est aujourd’hui auteure, conférencière et animatrice d’ateliers sur le management.
Elle cumule 10 ans d’expérience dans les Ressources Humaines et 15 ans dans le management opérationnel. Cette double expertise lui permet de prendre le recul nécessaire pour identifier et proposer de nouvelles manières de voir et de faire.

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