Quand les nouvelles générations bousculent les codes de management
Quand les nouvelles générations
bousculent les codes de management
Ombeline de Lavenère pour le webmagazine Octave
On dit souvent que Les jeunes sont “impertinents, éternellement insatisfaits, anti-hiérarchie, égo-centrés, irresponsables…”. Ces termes utilisés trop facilement par une génération ne les comprenant pas sont loin de la réalité. Loin des clichés, ces nouvelles générations ont un apport réellement bénéfique sur le monde de l’entreprise. Leur capacité d’adaptation à un monde constamment en mouvement est naturelle. Passer une journée avec eux, c’est adopter 50 ans d’innovation et avoir encore suffisamment d’énergie pour en inventer de nouveaux usages. Ils incarnent la « Continuous Organization[1] ».
Dès lors, comment amorcer une introspection au sein de l’entreprise pour transformer nos habitudes managériales et apporter à cette nouvelle génération des pratiques adaptées à leurs besoins ?
X,Y, Z le choc des générations
Certaines organisations comptent jusqu’à 5 générations, avec chacune sa propre vision du management idéal[2] :
GEN-Y (why) : La génération en quête de sens
Cette génération qui représentera 75% de la population active avant 2030, est entrée sur le marché du travail en pleine crise économique post « 11 septembre ». Ces digital-natives se remettent naturellement en question pour évoluer dans leur carrière et cherchent des leaders-supporters pour les guider.
GEN-Z : La génération qui remet les compteurs à zéro
Aujourd’hui, la Gen Z bouscule les codes du management, avec des attentes axées sur le bien-être au travail et le sens donné à leur mission.
Et demain, les alpha ?
Ces jeunes salariés veulent plus de flexibilité.
- 25% préféreraient devenir leur propre patron[3].
- 50% souhaitent pouvoir travailler selon leurs méthodes.
- 73% de la Gen-Z attendent de l’entreprise qu’elle lui permette d’organiser ses horaires de travail.
- 42% voudraient participer aux décisions stratégiques (vs 36% Gen-Y).
- Ils veulent être considérés d’égal à égal par leur hiérarchie (sans remettre en cause son existence) et attendent de leurs managers un mode de travail convivial, favorisant la transmission et le droit à l’erreur.
Allo Houston ! On a un problème[4]
Face à leurs attentes et à la remise en cause du système vertical, le management « traditionnel » perd le contrôle :
« C’était mieux avant ! Il y avait un chef qui dirigeait et des employés qui suivaient. Maintenant, ils veulent apporter leur grain de sel partout et croient tout savoir mieux que nous, c’est devenu incontrôlable ! » Tout va bien…
Ok Boomer[5] !
Ce clivage générationnel est caricatural et trop simpliste.
En réalité, toutes ces attentes que l’on attribue aux nouvelles générations sont partagées par l’ensemble de la population active.
La crise du covid illumine ces besoins latents (équilibre pro/perso, télétravail, autonomisation…) et démontre qu’il est possible d’y répondre sans nuire aux performances des entreprises.
Sommes-nous des Gen-Z qui s’ignorent ?
Il n’y pas de monde d’avant ni de monde d’après. La société évolue.
Les entreprises doivent faire confiance à l’intelligence collective pour se réinventer
50 nuances de management
L’innovation managériale n’est pas une expression, ni un concept tendance. Au fil des générations, le management se réinvente, répondant à de nouveaux besoins et objectifs.
Dans son livre « Reinventing organizations », Frédéric Laloux explique comment les organisations ont connu plusieurs révolutions[6], passant du modèle « rouge » régi par la peur du dictateur, au « vert » favorisant l’engagement coopératif au sein d’une entreprise-famille.
Les dernières années ont vu émerger le modèle « opale » (holacratie/entreprise libérée), qui envisage l’entreprise comme un organisme vivant basé sur un principe d’auto-gouvernance, favorisant l’affirmation de soi. L’entreprise libérée ne s’appuie ni sur les décisions unilatérales d’un chef autocratique, ni sur un consensus démocratique déresponsabilisant et inerte.
Le leadership devient dynamique en évoluant selon les compétences et l’expérience requises pour chaque contexte spécifique.
- Laloux illustre « opale » avec la success-story[7] Buurtzorg[8], entreprise hollandaise de services infirmiers à domicile. En 2006, la recherche de productivité, au détriment du rapport humain, a conduit l’infirmier Jos de Blok à quitter le système d’État pour créer sa propre organisation centrée sur la mission première des infirmiers : le bien-être du patient.
Chaque équipe agit de manière autonome, sans rapport hiérarchique.
Aucun indicateur de performance, seul compte le respect des 4 préceptes fondateurs :
- NEEDING : Les besoins du patient sont au centre
- RETHINKING : Si l’on pense que notre manière de faire n’est pas la meilleure, alors il faut la changer
- COMMUNE SENSE : Le bon sens l’emporte sur les process
- MEANINGFUL RELATIONSHIPS : Les relations humaines sont à la base de l’organisation
Buurtzorg en chiffres :
2006 : 4 infirmiers
2020 : +10.000 employés
70% du marché hollandais.
-40% des frais médicaux vs système traditionnel
Dans son livre « Humanocracy »[9], G. Hammel préconise une approche centrée sur l’humain pour repenser le management autour de 3 piliers : Résilience/Créativité/Passion, en opposition au système « bureaucratique ».
Les composantes d’une transformation réussie :
- Propriété répartie entre les salariés
- Règles du marché appliquées en interne
- Méritocratie valorisant le développement des compétences
- Communauté favorisant l’épanouissement personnel
- Ouverture vs secret bureaucratique et opacité
- Expérimentation pour apprendre de ses erreurs
- Paradoxe pour se réinventer, se challenger
Si nous devions retenir que 2 choses de ces lectures, je dirais :
- Il n’existe pas de modèle universel à copier-coller. Chaque transformation réussie est basée sur l’expérimentation de techniques et d’outils managériaux[10], au service d’une vision partagée et d’objectifs communs[11].
- La disparition du modèle pyramidale au profit d’un pilotage basé sur l’intelligence collective et le « bien-être ensemble », ne signe pas la fin du management.
Il doit se réinventer et retrouver du « sens », en ne se limitant plus à donner des ordres et contrôler[12], mais à inspirer et guider ses équipes, toutes générations confondues.
Un nouveau mode de relation doit s’installer, en passant d’un ascendant vertical (Parent/Enfant) à une horizontalité collaborative (Adulte/Adulte)[13], qui permet à chacun de s’exprimer en accord avec soi-même et d’agir de manière responsable et autonome dans son domaine de délégation.
Prêt à libérer votre management ? Check-up avant de se lancer
6 facteurs clés pour faire évoluer vos pratiques managériales[14] :
- Confiance et transparence
- Humilité et partage des responsabilités
- Créativité et inspiration
- Écoute et intelligence collective
- Pertinence et agilité
- Résilience et droit à l’erreur
[1] https://content.rhapsodiesconseil.fr/continuous-organiztion
[2] Source : mccrindle – https://mccrindle.com.au/insights/blog/generation-next-meet-gen-z-alphas/
[3] http://online.mazars.fr/etude-gen-z
[4] https://youtu.be/9yT_h9MQ0rw
[5] https://youtu.be/KsHYjNbGw2Y
[6] https://vimeo.com/121517508
[7] https://youtu.be/zszZ9NBSPUI
[8] Buurtzorg signifie « soins de quartier » en néerlandais
[9] https://www.youtube.com/watch?v=vTZHQqEK-CE
[10] Shadow CoDir/Comex – Mentorat inversé – Auto-évaluation – Hackathon – Design thinking – Golden circle – Les Labs (switch lab, junior lab…) – Co-développement – Réseaux apprenants – Corporate hacking – Droit à l’erreur (test&learn) – Management agile / 3.0 – Intelligence collective – auto-gestion
https://www.dunod.com/entreprise-economie/boite-outils-innovation-manageriale
[11] Quelques exemples de success/fail stories :
https://www.journaldunet.com/management/ressources-humaines/1144554-les-pratiques-manageriales-les-plus-innovantes-du-monde/
https://www.innovationmanageriale.com/les-plus-populaires/les-6-postures-de-linnovation-manageriale/
https://www.cadre-dirigeant-magazine.com/manager/6-innovations-manageriales-qui-font-leur-preuve-en-entreprise
https://www.latribune.fr/opinions/tribunes/l-innovation-manageriale-encore-plus-efficace-que-l-innovation-technologique-822990.html
https://comin.madmagz.news/des-pratiques-manageriales-innovantes-pour-repenser-lentreprise/
[12] VIDÉO turn the ship around David Marquet
[13] cf. Analyse transactionnelle – État du Moi
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