Intégrer et manager les générations au sein des organisations
Intégrer et manager les générations au sein des organisations
Rencontre avec Julien Pouget consultant, auteur et conférencier, spécialiste de la conduite du changement et du management. Dans cet article, Julien Pouget nous délivre son point de vue concernant l’intégration et le management des différentes générations au sein des organisations.
Comment les entreprises peuvent-elles s’adapter aux comportements changeant des nouvelles générations ?
Le caractère changeant des comportements revient, il est vrai, souvent sur la table lorsque qu’il est question des nouvelles générations. Pour les managers qui ont connu une certaine stabilité sur le plan professionnel, cette dimension est difficile à intégrer. En témoignent, les critiques sur l’impatience, le zapping, le slashing, etc. De mon point de vue, ces critiques oublient deux points essentiels :
D’abord, le fait que le monde actuel, dans lequel ont grandi ces jeunes générations, est caractérisé par l’instabilité et le changement permanent. Qu’il s’agisse de technologie, d’économie ou de social, les plus jeunes ont été habitué à vivre dans un environnement en constante évolution. Il est donc normal que leur référentiel soit plutôt du côté du changement que de la stabilité.
Ensuite, le fait que pour s’adapter à leur écosystème changeant, les entreprises ont besoin de ressources capables d’évoluer rapidement, de se repositionner voire de se réinventer. De ce point de vue, l’aspect changeant est moins un handicap qu’un atout. Pour paraphraser Einstein, la folie serait plutôt d’adopter toujours le même comportement indépendamment des évolutions constantes que nous connaissons.
Comment intégrer et appréhender toutes les générations au sein des entreprises ?
Même s’il n’existe pas de recette miracle, plusieurs pistes permettent d’avancer :
Considérer la diversité générationnelle comme une richesse. Loin de menacer l’équilibre de l’entreprise, la diversité de visions, d’opinions ou d’attentes portée par les générations est une richesse. A l’heure où les entreprises doivent résoudre des problèmes imprévisibles, complexes et internationaux, la standardisation des comportements est contreproductive. Seule l’intelligence collective, dont la puissance repose précisément sur la diversité des acteurs et de leurs points de vue, permet de s’attaquer à ces grands défis.
Accepter de flexibiliser les parcours RH. Beaucoup d’entreprises demeurent rigides sur le parcours et l’expérience qu’elles proposent aux salariés. Qu’il s’agisse du salaire d’embauche, des conditions pour évoluer ou simplement des modes de travail, le réflexe des organisations est trop souvent de se tourner vers l’interne (que prévoient mes grilles ? Que disent mes règles RH ? Etc.). Or, à l’image des consommateurs, les collaborateurs ont de plus en plus les moyens de faire jouer la concurrence. Et dire à un profil recherché que sa rémunération ne tient pas dans les grilles ou que le télétravail n’est pas prévu par le règlement intérieur n’est sans doute pas le meilleur moyen de gagner la guerre des talents.
Passer du lien de subordination au lien de collaboration. Le style managérial « command and control », hérité des entreprises tayloriennes et mécanistes, demeure hélas très présent dans les entreprises. Sans surprise, il ne correspond en rien aux attentes des jeunes générations (et pas que) qui souhaitent travailler « avec » et non « pour » un manager. La perte de sens, le désengagement et les R.P.S. sont souvent le fruit du décalage entre le rêve d’un coach et la réalité d’un petit-chef. En faisant la promotion d’un management de l’ouverture auprès de ses lignes managériales, l’entreprise facilite l’intégration des plus jeunes et donne un rôle plus gratifiant aux expérimentés.
Comment préparer les entreprises au futur du travail, aujourd’hui ?
Sans prétendre à l’exhaustivité, deux axes semblent intéressants.
- Associer les jeunes aux réflexions sur l’avenir
En dépit des discours volontaristes sur la nécessité de mieux intégrer les jeunes, force est de constater qu’un certain cloisonnement demeure en entreprise. La réflexion sur l’avenir de l’entreprise en est une bonne illustration. A l’exception de quelques initiatives très médiatiques de type Shadow Comex, il est rare que les jeunes collaborateurs soient associés à la construction du futur de leur entreprise. Or, l’absence de diversité générationnelle (et de diversité en général) a souvent pour effet d’accentuer la « pensée de groupe » et la culture du consensus. On accorde alors un crédit prédominant à l’expérience et aux « méthodes éprouvées », au détriment des innovations et des idées en rupture. Et l’on oublie ainsi que ceux qui ont inventé Airbnb ou Facebook ne disposait pas de trente ans d’expérience en hôtellerie ou en informatique.
- S’ouvrir largement sur l’écosystème
De mon point de vue, les entreprises qui se préparent le plus efficacement au futur du travail ont deux points communs.
D’abord, l’ouverture sur leur écosystème. Souvent convaincues que « le futur est déjà là », ces entreprises adoptent des démarches volontaristes pour s’ouvrir aux innovateurs (start-ups, chercheurs, étudiants, etc.) et capter des tendances.
Ensuite, la capacité à se remettre en question. Capter des tendances n’est bénéfique que si l’entreprise est prête à challenger périodiquement son modèle économique, sa gouvernance, ses modes de management, etc. De ce point de vue, la présence croissante de membres de la génération « pourquoi ? » dans les entreprises facilite beaucoup la remise en question.
Julien Pouget est consultant, auteur et conférencier. Spécialiste de la conduite du changement et du management, il accompagne les entreprises et leurs dirigeants dans l’écriture de leur futur au sein du cabinet Bengs dont il est Associé. Il est l’auteur des livres « Intégrer et manager la Génération Y » et « Lâcher-prise en entreprise ».
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