La diversité par le partage d’emploi
La diversité par le partage d’emploi
Irenka Krone-Germann est la Co-fondatrice et directrice de l’Association PTO (Part Time Optimisation) qui vise à promouvoir le jobsharing en Suisse et à informer les employés et les employeurs sur les spécificités du partage d’emploi et la Co-fondatrice de We Jobshare Sàrl, une plateforme créée par l’Association PTO pour permettre aux employés de Suisse de trouver des partenaires en job sharing.
Partager son emploi pour parvenir à plus de diversité en s’occupant de plusieurs activités intéressantes en parallèle. Tel est le rêve d’une partie de la société curieuse et investie, ces personnes dénommées « les slasheurs du travail ». Trouver deux talents pour une seule fonction, tel est le souhait de maints employeurs. Le job et top sharing intergénérationnel est dans ce contexte particulièrement intéressant.
Trouver l’employé ou travailleur idéal à cinq pattes reste un défi des employeurs. Au travers d’un binôme, l’employeur bénéficie de deux expertises au prix d’une et s’offre en parallèle une présence à 100% en entreprise. Le cumul des compétences se fait sentir au niveau des langues, de l’expérience de chaque partenaire et des qualités personnelles au sein du binôme. S’ajoute à cela un surplus de productivité si l’on tient compte de la juxtaposition de deux personnes à plein rendement. Les prises de décision sont souvent plus abouties par l’échange entre partenaires et par les réseaux à double.
Le partage d’emploi, appelé communément job sharing n’est pas un concept nouveau. Créé aux Etats-Unis il y a plus de 30 ans, le job sharing prend aujourd’hui un essor nouveau grâce à l’ère numérique. Les avancées digitales poussent à réinventer les environnements de travail. Dans ce contexte particulier, le job et top sharing sont des modèles de travail convoités par les hommes et femmes de toutes générations. Les entreprises avant-gardistes les soutiennent pour pérenniser leur savoir-faire, retenir leurs talents et rester attractives sur le marché du travail.
Partenariats intergénérationnels
Les postulations de paires intergénérationnelles (duo en job sharing composé de deux personnes avec un écart d’âge au minimum de 10 ans) sont particulièrement appréciées par les employeurs qui cherchent plus de diversité et de cohésion intergénérationnelle.
Plus que le « reverse mentoring » (lorsque la génération Y forme les aînés dans l’entreprise) ou le « mentoring » (lorsque le soutien circule des ainés vers les plus jeunes), le job sharing intergénérationnel permet d’assurer tout au long de l’année un transfert de savoir. Des personnes expérimentées intègrent ainsi les jeunes plus rapidement. Les plus jeunes soutiennent les seniors dans les nouveaux développements technologiques. Les babyboomers se mélangent ainsi à la génération X, tout comme le font les générations qui suivent.
La diversité est au coeur de toute entreprise et au sein d’une société de plus en plus globalisée et multiculturelle. Elle est l’essence même de la créativité. D’un point de vue entrepreneurial, recruter des équipes de travail multiculturelles, diversifiées au niveau genre et intergénérationnelles signifie à la fois richesse mais aussi défi dans la collaboration même au sein des équipes de travail. Le partage d’emploi permet de par sa modalité flexible une telle cohésion et un déroulement harmonieux.
Retenir les talents
Particulièrement exigeants sur le marché de l’emploi et avides de flexibilité, les générations Y et Z s’intéressent de plus en plus à ces modèles de travail. Entre le temps partiel, le travail à domicile et les nouvelles formes de co-working, le job sharing est un modèle particulièrement attractif. Afin de conserver les talents, les employeurs responsables soutiennent le partage d’emploi pour rester attractifs face à la concurrence. La rétention de talents s’avère même une nécessité pour les spécialistes en ressources humaines et le management. Perdre une femme hautement qualifiée après une dizaine d’années d’activité professionnelle, lorsqu’elle attend son premier enfant et souhaite réduire son volume d’activité, survient plus fréquemment lorsque l’entreprise ne peut offrir un temps partiel combiné avec un poste à responsabilité. Face à de telles situations, le job ou top sharing est une solution particulièrement intéressante car le modèle permet de faire carrière tout en restant actifs à temps partiel.
Carrières multiples ou slash careers
Cette mouvance est d’autant plus importante que les processus internes au sein des entreprises ne cessent de se transformer et sont tributaires du monde digital. Pour un grand nombre d’employés, travailler dans des environnements souples et ouverts à l’innovation permet d’être actifs dans d’autres domaines professionnels, voire d’entamer, en parallèle, une carrière d’indépendant. Les partisans de ces carrières multiples pratiquent ce qu’on appelle aux Etats-Unis les « slash careers » ou les carrières multiples. Il s’agit là de pratiquer deux activités lucratives de manière volontaire en parallèle sans que cette décision soit liée à une situation de travail précaire.
Vision commune
Mais le job sharing n’est pas fait pour tous et nécessite des prérequis: flexibilité, générosité, engagement professionnel, volonté de dialogue, partage du pouvoir et confiance en l’autre. La pratique du job et top sharing exige surtout des valeurs et une vision communes. Trouver un bon partenaire reste une condition sine qua non pour assurer un job sharing efficace. Pour postuler à deux, il faut tout d’abord identifier un partenaire aux valeurs communes, se rencontrer au préalable et tester le duo.
Pour toute information, témoignages et films, visitez notre site : www.go-for-jobsharing.ch et notre plateforme de mise en partenariat: www.wejobshare.ch. Voir Film colloque international job sharing 2017 auquel ont participé près de 200 personnes de 11 pays.
Pour aller plus loin : Publié chez l’Harmattan en 2016, l’ouvrage collectif «Partage d’emploi – Job sharing : Nouvelles opportunités et défis du travail» regroupe les contributions de 34 auteurs des milieux économique et académique de Suisse, Allemagne, France, Grande-Bretagne et Hongrie. Les divers experts relatent le développement du partage d’emploi dans leur pays. Leurs angles d’analyse mettent en exergue le potentiel du partage d’emploi à l’ère numérique ainsi que l’impact de ces modèles pour parvenir à plus d’équité entre les genres sur le marché de l’emploi. L’ouvrage intègre non seulement la dimension que revêt le job sharing pour les employés et les employeurs mais aussi pour la société en général intégrant également une analyse des job sharings intergénérationnels.
Irenka Krone-Germann pour le webmagazine Octave
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